Le samedi 5 février, nous nous installons au camping La Ferme SERDRAR à quelques kilomètres de TAZZARINE. Le dimanche 6 février en fin d'après-midi, nous discutons dans le camping-car de notre prochain lieu de villégiature et du camping où passer peut-être quelques jours, quand tout à coup je me suis aperçue que Dakota n'était plus dans son panier. Je fais le tour du camping sans l'apercevoir, je demande à Saïd – l'employé du camping - aux autres touristes, personne ne l'avait vu. Un autre employé nous fait signe qu'il l'a vu partir à l'extérieur. Saïd, l'autre employé et moi-même partons donc à sa recherche. Nous l'apercevons à quelques centaines de mètres sur notre droite puis plus à gauche. Les deux marocains accélèrent brusquement le pas et me distancent rapidement, malgré mes mises en garde de ne pas le poursuivre car le chien risque de fuir de plus en plus loin. Hélas, c'est ce qui s'est passé. La nuit venant, je fais ½ tour de peur de me perdre également. Il faut imaginer l'environnement : au bout d'une piste de 6 kms, un camping au milieu d'une petite oasis avec quelques arbres, des palmiers et des cultures de légumes, mais autour des dizaines et des dizaines de km² de sable et de cailloux, et de rares mini villages dont le premier se trouve à 3 kms et le troisième à 8 kms. Le chien n'a pas réapparu le soir, ni le lendemain. Le matin, Saïd nous fait savoir qu'il a prévenu toutes les personnes aux alentours, dans les villages, pour avoir des indices. Nous partons avec Idir – le propriétaire du camping - sur le chemin pris la veille par le chien jusqu'à la rivière où il avait été perdu de vue dans la nuit, mais pas de chien, juste des traces de pattes. A midi, Saïd nous informe que le chien a été repéré près de l'école d'un village « assez loin » où nous ne pouvons aller à pied. Idir, le propriétaire, qui ne parle pas le français y part donc avec sa « moto » (mobylette) puis revient plus tard sans le chien. Il nous fait comprendre qu'il a vu le chien mais qu'il s'est enfui. En fin d'après-midi J.P part seul vers le village qui n'est pas si loin que ça et un peu plus tard Saïd me demande également d'aller au village avec une femme et sa fille Saïda de 8 ans. D'autres femmes me rejoignent en cours de route et toutes m'indiquent des traces de chien un peu partout (j'ai des doutes !!). Seule Saïda parle correctement le français. Après avoir beaucoup marché, je suis découragée et, la nuit tombant, je leur demande de rentrer au camping et de ne plus s'occuper des recherches qui me semblent totalement inutiles et surtout désorganisées. A son retour, JP me raconte que le propriétaire du camping l'a rejoint avec sa moto et avant même d'avoir pu se rendre au village, l'a obligé à monter sur le porte bagage pour lui montrer des traces de pattes, très loin de là, plus au sud. Beaucoup de discussions avec les différentes personnes qui participent aux recherches ; on nous dit que si on a des indices pour retrouver le chien, il faudra peut-être verser une récompense, ce dont nous sommes tout à fait d'accord, sans en définir le montant.
Deuxième nuit sans Dakota … Nous commençons vraiment à nous faire du souci pour lui et désespérons de le retrouver. Nous décidons d'attendre encore un jour au camping et d'entreprendre seuls au petit jour une recherche autour du village et des cultures de carottes où Dakota aurait été aperçu.
Rien, toujours rien, beaucoup de personnes l'ont vu, mais pour nous il est toujours invisible. A midi, JP discute avec Saïd pour lui faire comprendre notre attachement à ce chien – ce qui pour les marocains ne veut rien dire – que sauf miracle on ne reverra sans doute jamais. Il l'informe qu'il reprendra les recherches à 14 h et que, sans résultat, nous partirions le lendemain matin sans savoir ce qu'allait devenir notre Dakota ou plutôt en imaginant trop bien ce qui allait lui arriver !! A 12 h 45 Saïd vient chercher JP : « vite vite, prends tes affaires et un peu à manger pour le chien, on sait où il est, dans un autre village, tu pars en moto ». Le temps passe – entre une et deux heures – puis Saïd et toutes les femmes m'appellent « madame, madame, ça y est, monsieur a le chien, il a été retrouvé, c'est sûr ». Quel soulagement ! quel bonheur ! j'embrasse tout le monde en les remerciant. On appelle JP sur son portable pour avoir la confirmation. Dakota est bien avec lui, il est en bonne santé. « Je te raconterai » me dit-il. A leur retour, je constate que Dakota est un peu amaigri, qu'il est très sale, qu'il sent la chèvre et que ses coussinets sont très abimés. Il semble bien fatigué.
Mais que s'est-il passé en cet après-midi du mardi 8 février dans ce village où l'on a enfin retrouvé notre Dakota ? En voici la narration par le principal acteur, JP :
Alors que nous finissons de déjeuner et que trois camping-car arrivent pour se garer, Saïd accourt en trombe et me lance : « M'sieur Jean-Pierre il y a du nouveau, le chien est repéré dans un village loin loin » (en me montrant le sud) prenez un sac et de la nourriture pour Dakota. Dans le même temps je vois passer Idir qui se dirige en courant vers son habitation. Saïd me demande de le suivre, je lui emboite le pas à la course au milieu des autres résidents qui visiblement ne comprennent pas ce qui se passe et je le rejoins devant sa kasbah située derrière le camping.
Il enfourche avec fougue sa petite moto et me demande d'en faire de même, et nous voilà partis sur sa pétrolette qui comme la veille émet toujours des forts claquements à petite vitesse. Nous sortons de son enclos et partons vers l'est par une piste peu praticable. Idir me fait des signes indiquant que nous allons prendre la direction du sud, passe la troisième vitesse, mais pour l'instant je préfère me tenir solidement au porte-bagages et rentrer mes pieds que de savoir dans quelle direction nous nous dirigeons ! Le passage dans le lit sablonneux d'un oued nous fait zigzaguer et Idir rétablit l'équilibre en mettant au sol ses pieds. Voyant arriver d'autres passages délicats, je tape sur son épaule et lui fais comprendre de ralentir , après tout vu la distance où se trouve le village que je n'aperçois pas, nous ne sommes pas à une minute près pour retrouver l'animal.
Après un brusque virage à droite pour prendre une piste, nous voici fonçant dans un désert de pierres et de sable, plat à l'infini, et je me demande ce que je peux bien faire ici. Après plusieurs kilomètres sur la piste et beaucoup de chassés rétablis in extremis, je commence à apercevoir un château d'eau dans la brume, mais devant nous se dresse une barrière de sable, on verra bien lorsque nous y serons. Petit à petit, nous approchons de la barrière, je vois qu'il y a des trous ... ouf ça va passer.
Nous approchons du village. Sur la gauche, au bord de la dépression, se tient sur un vélo un guetteur très voyant avec son gilet fluo jaune. Idir le questionne au passage. Que se sont-ils dit ????
Nous repartons pour le village, petit bourg très poussiéreux qui domine des cultures presque à perte de vue sur la gauche, mais juste aux portes d'un désert cette fois-ci de sable et du vrai ! Nous arrivons sur la place du village, sans casse ouf !
Il y a là une remorque attelée à un tracteur, un tas de pierres, une terrasse de bar où quelques hommes en djellaba sont assis, des enfants qui courent et d'autres avec des cartables qui se dirigent vers l'école du hameau. On me regarde avec étonnement, car je suis un étranger.
Idir qui était entré dans une maison en ressort avec un homme handicapé et tous deux se dirigent vers le tracteur et commencent à palabrer. Visiblement nous allons utiliser le tracteur mais la remorque est encore attelée. D'un seul élan les hommes attablés à la terrasse du café se lèvent et viennent empiler des grosses pierres plates pour y poser l'attache de la remorque. En deux minutes la remorque est séparée du tracteur et on me fait comprendre de monter. Nous voici partis on ne sait où …. mais qu'est ce que je suis venu faire dans cette galère ? Ah oui, récupérer Dakota qui doit être dans les cultures, pourchassé par des gens du village.
Nous repartons avec le tracteur à toute allure sur le chemin. J'ai beaucoup de peine à me tenir sur le garde-boue de la roue et ma tête et mes bras tapent sur les supports de la galerie qui sert de protège soleil. Si ça continue je vais avoir des bleus.
Dans le bruit, les chocs et la poussière, un portable sonne. Le conducteur donne le portable à un bédouin monté à l'arrière sur la boule de la remorque. Il décroche et annonce une grande nouvelle, Idir me congratule : le chien est attrapé et nous allons rentrer au village. Soupir de soulagement.
Pas du tout, nous prenons une nouvelle direction, plein sud. Le tracteur maintenant navigue au milieu des parcelles et se fraye un chemin jusqu'à un riad, s'arrête à une centaine de mètres : ldir et moi partons sans un bruit, sur la pointe des pieds à la recherche de Dakota. Nous passons un erg de sable qui court tout le long des plantations et qui sépare les cultures du désert. Nous faisons le tour de la bâtisse et du puits sur la pointe des pieds, comme les sioux dans les premiers films de western : rien et rien. Idir me montre des traces sur le sable, je fais la moue : je ne reconnais pas les traces qu'il m'affirme être celles du chien, les mêmes traces qu'il a voulu me montrer hier soir loin du premier village mais en direction d'ici.
Vite, vite,venez nous rejoindre, nous indique par gestes un ouvrier posté le long de l'erg, nous faisant comprendre qu' »il » est là, là dans les plantations. En courant, nous rejoignons l'ouvrier qui m'assure par gestes une nouvelle fois qu' »il » est bien là. Entre temps, le tracteur a franchi l'erg. Nous y remontons car un peu plus loin on vient encore de voir le chien. Un autre ouvrier sorti de nulle part me montre en dirigeant ses deux doigts vers ses yeux qu'il a bien vu le chien, que moi, pauvre étranger je n'arrive pas à voir ni même à apercevoir. Un autre ouvrier sur une mobylette m'appelle : son copain voit le chien dans les plantations. Le copain sort du talus et s'adresse à moi en français : « il est là, il sort des cultures et se dirige vers le village » village situé en hauteur face à nous maintenant. L'ouvrier à la mobylette prend son copain sur le porte bagage et tous deux poursuivent le chien censé galoper vers le village mais que je ne vois toujours pas, pas même la poussière de sa course alors que l'engin motorisé soulève un gros nuage de poussière. Nous avons fait depuis le départ du village un grand tour de deux à trois bons kilomètres, et vite nous remontons sur le tracteur qui a suivi, pour rattraper la mobylette qui a bifurqué sur la gauche. A toute vitesse, nous partons et passons par la droite sur l'injonction de Idir. Soudain nous ralentissons pour entrer dans le village et tournons à gauche dans une rue. En même temps, débouchant d'une rue par la droite, arrive face à nous la mobylette dont le conducteur tient Dakota sous son bras tout en conduisant. On me remet le chien pas du tout essoufflé mais les moustaches fraichement mouillées, alors que je m'inquiétais sur son état. J'avais en effet durant la poursuite vérifié si j'avais emporté une bouteille d'eau et fouillé en vain dans mon sac à dos, je n'avais pas d'eau. Après une telle course poursuite, le quatre pattes aurait dû être très assoiffé et essoufflé.
Les retrouvailles faites avec Dakota, je me retrouve curieusement seul avec le conducteur et deux de ses acolytes. Pour récompenser tout ce monde, je sors de mon porte-monnaie le seul billet de 1OO dirhams en ma possession, mais à ma grande surprise personne ne semble vouloir le prendre ….Le conducteur finit par accepter. Puis les deux ouvriers sur la mobylette reviennent et me présentent un papier jaune ainsi libellé :
On a dépensé beaucoup d'essence et perdu beaucoup de temps sur notre travail pour chercher et récupérer ton chien. Monsieur. Tu dois une récompense de 500 dirhams (50€) merci
Ma surprise passée, je reprends le billet de 100 dirhams et le donne aux deux ouvriers de la mobylette. Bien sûr ils ne sont pas d'accord avec la somme.
Comme par hasard, l'homme qui parle le français et Idir reviennent vers moi et m'expliquent qu'il faut payer.....(la rançon). Comme je n'ai pas l'argent et toujours sous le coup des retrouvailles avec Dakota je leur promets que je remettrai le reste à Idir à notre retour au camping.
Nous emballons et attachons le chien dans le sac à dos en laissant juste dépasser la tête et nous repartons pour le camping.
Sur les pistes du retour, j'ai droit de la part de Idir à une chansonnette de bonheur d'avoir retrouver le chien (ou de toucher une partie de la récompense ?)
A notre retour au camping, Chantal nous accueille avec grand soulagement.
A peine le temps de boire un rafraichissement que les hommes qui avaient soi disant perdu beaucoup d'essence et de temps sur leur travail débarquent au camping pour toucher la récompense promise. Saïd sert d'intermédiaire et je lui explique que je consens à donner encore 200 dirhams mais pas plus. Il s'en suit d'interminables palabres et comme je ne cède pas, Idir donne les 200 dirhams manquants sur la caisse du camping. Me voilà bien obligé de donner les 200 dirhams à Idir !! Les deux hommes contents d'avoir toucher intégralement leur rançon partent sans aucun salut. Je m'empresse de les rattraper et je leur demande par l'intermédiaire de Saïd de me saluer et comme ils refusent je demande à prévenir le caïd local : les deux RANCONNEURS reviennent sur leurs pas et nous faisons la paix.
Nous ne sommes pas dupes : vu l'état du chien à la restitution, le tour en mobylette et en tracteur n'étaient qu'une mascarade pour nous rançonner.
Il eut été plus simple que les deux motocyclistes viennent nous ramener le chien au camping, et devant le « coca cola » de l'amitié nous aurions donné cette récompense de 500 dirhams envisagée le matin même.
La joie de Chantal et le bonheur de Dakota valent bien plus de 500 dirhams, mais ça il ne faut pas leur dire......
Depuis cette aventure, nous avons donné un nouveau nom à notre chien :
Deuxième nuit sans Dakota … Nous commençons vraiment à nous faire du souci pour lui et désespérons de le retrouver. Nous décidons d'attendre encore un jour au camping et d'entreprendre seuls au petit jour une recherche autour du village et des cultures de carottes où Dakota aurait été aperçu.
Rien, toujours rien, beaucoup de personnes l'ont vu, mais pour nous il est toujours invisible. A midi, JP discute avec Saïd pour lui faire comprendre notre attachement à ce chien – ce qui pour les marocains ne veut rien dire – que sauf miracle on ne reverra sans doute jamais. Il l'informe qu'il reprendra les recherches à 14 h et que, sans résultat, nous partirions le lendemain matin sans savoir ce qu'allait devenir notre Dakota ou plutôt en imaginant trop bien ce qui allait lui arriver !! A 12 h 45 Saïd vient chercher JP : « vite vite, prends tes affaires et un peu à manger pour le chien, on sait où il est, dans un autre village, tu pars en moto ». Le temps passe – entre une et deux heures – puis Saïd et toutes les femmes m'appellent « madame, madame, ça y est, monsieur a le chien, il a été retrouvé, c'est sûr ». Quel soulagement ! quel bonheur ! j'embrasse tout le monde en les remerciant. On appelle JP sur son portable pour avoir la confirmation. Dakota est bien avec lui, il est en bonne santé. « Je te raconterai » me dit-il. A leur retour, je constate que Dakota est un peu amaigri, qu'il est très sale, qu'il sent la chèvre et que ses coussinets sont très abimés. Il semble bien fatigué.
Mais que s'est-il passé en cet après-midi du mardi 8 février dans ce village où l'on a enfin retrouvé notre Dakota ? En voici la narration par le principal acteur, JP :
Alors que nous finissons de déjeuner et que trois camping-car arrivent pour se garer, Saïd accourt en trombe et me lance : « M'sieur Jean-Pierre il y a du nouveau, le chien est repéré dans un village loin loin » (en me montrant le sud) prenez un sac et de la nourriture pour Dakota. Dans le même temps je vois passer Idir qui se dirige en courant vers son habitation. Saïd me demande de le suivre, je lui emboite le pas à la course au milieu des autres résidents qui visiblement ne comprennent pas ce qui se passe et je le rejoins devant sa kasbah située derrière le camping.
Il enfourche avec fougue sa petite moto et me demande d'en faire de même, et nous voilà partis sur sa pétrolette qui comme la veille émet toujours des forts claquements à petite vitesse. Nous sortons de son enclos et partons vers l'est par une piste peu praticable. Idir me fait des signes indiquant que nous allons prendre la direction du sud, passe la troisième vitesse, mais pour l'instant je préfère me tenir solidement au porte-bagages et rentrer mes pieds que de savoir dans quelle direction nous nous dirigeons ! Le passage dans le lit sablonneux d'un oued nous fait zigzaguer et Idir rétablit l'équilibre en mettant au sol ses pieds. Voyant arriver d'autres passages délicats, je tape sur son épaule et lui fais comprendre de ralentir , après tout vu la distance où se trouve le village que je n'aperçois pas, nous ne sommes pas à une minute près pour retrouver l'animal.
Après un brusque virage à droite pour prendre une piste, nous voici fonçant dans un désert de pierres et de sable, plat à l'infini, et je me demande ce que je peux bien faire ici. Après plusieurs kilomètres sur la piste et beaucoup de chassés rétablis in extremis, je commence à apercevoir un château d'eau dans la brume, mais devant nous se dresse une barrière de sable, on verra bien lorsque nous y serons. Petit à petit, nous approchons de la barrière, je vois qu'il y a des trous ... ouf ça va passer.
Nous approchons du village. Sur la gauche, au bord de la dépression, se tient sur un vélo un guetteur très voyant avec son gilet fluo jaune. Idir le questionne au passage. Que se sont-ils dit ????
Nous repartons pour le village, petit bourg très poussiéreux qui domine des cultures presque à perte de vue sur la gauche, mais juste aux portes d'un désert cette fois-ci de sable et du vrai ! Nous arrivons sur la place du village, sans casse ouf !
Il y a là une remorque attelée à un tracteur, un tas de pierres, une terrasse de bar où quelques hommes en djellaba sont assis, des enfants qui courent et d'autres avec des cartables qui se dirigent vers l'école du hameau. On me regarde avec étonnement, car je suis un étranger.
Idir qui était entré dans une maison en ressort avec un homme handicapé et tous deux se dirigent vers le tracteur et commencent à palabrer. Visiblement nous allons utiliser le tracteur mais la remorque est encore attelée. D'un seul élan les hommes attablés à la terrasse du café se lèvent et viennent empiler des grosses pierres plates pour y poser l'attache de la remorque. En deux minutes la remorque est séparée du tracteur et on me fait comprendre de monter. Nous voici partis on ne sait où …. mais qu'est ce que je suis venu faire dans cette galère ? Ah oui, récupérer Dakota qui doit être dans les cultures, pourchassé par des gens du village.
Nous repartons avec le tracteur à toute allure sur le chemin. J'ai beaucoup de peine à me tenir sur le garde-boue de la roue et ma tête et mes bras tapent sur les supports de la galerie qui sert de protège soleil. Si ça continue je vais avoir des bleus.
Dans le bruit, les chocs et la poussière, un portable sonne. Le conducteur donne le portable à un bédouin monté à l'arrière sur la boule de la remorque. Il décroche et annonce une grande nouvelle, Idir me congratule : le chien est attrapé et nous allons rentrer au village. Soupir de soulagement.
Pas du tout, nous prenons une nouvelle direction, plein sud. Le tracteur maintenant navigue au milieu des parcelles et se fraye un chemin jusqu'à un riad, s'arrête à une centaine de mètres : ldir et moi partons sans un bruit, sur la pointe des pieds à la recherche de Dakota. Nous passons un erg de sable qui court tout le long des plantations et qui sépare les cultures du désert. Nous faisons le tour de la bâtisse et du puits sur la pointe des pieds, comme les sioux dans les premiers films de western : rien et rien. Idir me montre des traces sur le sable, je fais la moue : je ne reconnais pas les traces qu'il m'affirme être celles du chien, les mêmes traces qu'il a voulu me montrer hier soir loin du premier village mais en direction d'ici.
Vite, vite,venez nous rejoindre, nous indique par gestes un ouvrier posté le long de l'erg, nous faisant comprendre qu' »il » est là, là dans les plantations. En courant, nous rejoignons l'ouvrier qui m'assure par gestes une nouvelle fois qu' »il » est bien là. Entre temps, le tracteur a franchi l'erg. Nous y remontons car un peu plus loin on vient encore de voir le chien. Un autre ouvrier sorti de nulle part me montre en dirigeant ses deux doigts vers ses yeux qu'il a bien vu le chien, que moi, pauvre étranger je n'arrive pas à voir ni même à apercevoir. Un autre ouvrier sur une mobylette m'appelle : son copain voit le chien dans les plantations. Le copain sort du talus et s'adresse à moi en français : « il est là, il sort des cultures et se dirige vers le village » village situé en hauteur face à nous maintenant. L'ouvrier à la mobylette prend son copain sur le porte bagage et tous deux poursuivent le chien censé galoper vers le village mais que je ne vois toujours pas, pas même la poussière de sa course alors que l'engin motorisé soulève un gros nuage de poussière. Nous avons fait depuis le départ du village un grand tour de deux à trois bons kilomètres, et vite nous remontons sur le tracteur qui a suivi, pour rattraper la mobylette qui a bifurqué sur la gauche. A toute vitesse, nous partons et passons par la droite sur l'injonction de Idir. Soudain nous ralentissons pour entrer dans le village et tournons à gauche dans une rue. En même temps, débouchant d'une rue par la droite, arrive face à nous la mobylette dont le conducteur tient Dakota sous son bras tout en conduisant. On me remet le chien pas du tout essoufflé mais les moustaches fraichement mouillées, alors que je m'inquiétais sur son état. J'avais en effet durant la poursuite vérifié si j'avais emporté une bouteille d'eau et fouillé en vain dans mon sac à dos, je n'avais pas d'eau. Après une telle course poursuite, le quatre pattes aurait dû être très assoiffé et essoufflé.
Les retrouvailles faites avec Dakota, je me retrouve curieusement seul avec le conducteur et deux de ses acolytes. Pour récompenser tout ce monde, je sors de mon porte-monnaie le seul billet de 1OO dirhams en ma possession, mais à ma grande surprise personne ne semble vouloir le prendre ….Le conducteur finit par accepter. Puis les deux ouvriers sur la mobylette reviennent et me présentent un papier jaune ainsi libellé :
On a dépensé beaucoup d'essence et perdu beaucoup de temps sur notre travail pour chercher et récupérer ton chien. Monsieur. Tu dois une récompense de 500 dirhams (50€) merci
Ma surprise passée, je reprends le billet de 100 dirhams et le donne aux deux ouvriers de la mobylette. Bien sûr ils ne sont pas d'accord avec la somme.
Comme par hasard, l'homme qui parle le français et Idir reviennent vers moi et m'expliquent qu'il faut payer.....(la rançon). Comme je n'ai pas l'argent et toujours sous le coup des retrouvailles avec Dakota je leur promets que je remettrai le reste à Idir à notre retour au camping.
Nous emballons et attachons le chien dans le sac à dos en laissant juste dépasser la tête et nous repartons pour le camping.
Sur les pistes du retour, j'ai droit de la part de Idir à une chansonnette de bonheur d'avoir retrouver le chien (ou de toucher une partie de la récompense ?)
A notre retour au camping, Chantal nous accueille avec grand soulagement.
A peine le temps de boire un rafraichissement que les hommes qui avaient soi disant perdu beaucoup d'essence et de temps sur leur travail débarquent au camping pour toucher la récompense promise. Saïd sert d'intermédiaire et je lui explique que je consens à donner encore 200 dirhams mais pas plus. Il s'en suit d'interminables palabres et comme je ne cède pas, Idir donne les 200 dirhams manquants sur la caisse du camping. Me voilà bien obligé de donner les 200 dirhams à Idir !! Les deux hommes contents d'avoir toucher intégralement leur rançon partent sans aucun salut. Je m'empresse de les rattraper et je leur demande par l'intermédiaire de Saïd de me saluer et comme ils refusent je demande à prévenir le caïd local : les deux RANCONNEURS reviennent sur leurs pas et nous faisons la paix.
Nous ne sommes pas dupes : vu l'état du chien à la restitution, le tour en mobylette et en tracteur n'étaient qu'une mascarade pour nous rançonner.
Il eut été plus simple que les deux motocyclistes viennent nous ramener le chien au camping, et devant le « coca cola » de l'amitié nous aurions donné cette récompense de 500 dirhams envisagée le matin même.
La joie de Chantal et le bonheur de Dakota valent bien plus de 500 dirhams, mais ça il ne faut pas leur dire......
Depuis cette aventure, nous avons donné un nouveau nom à notre chien :
Dakota, le Prince du Désert
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